Rickie Lee Jones JONES, Rickie Lee : chanteuse et guitariste de rhythm'n' blues, soul et jazz américaine, 1979. Née le 08.11.1954 à Chicago (Illinois).

Cette chanteuse californienne a évoqué dans ses chansons personnages et expériences rencontrés au fil d'une existence mouvementée. Sa voix très expressive, mi-chantée mi-parlée, et sa musique, pleine d'allusions au jazz des années 40 et au cabaret, l'ont souvent fait comparer à Tom Waits. Elle a eu la chance d'être entourée dès ses débuts de musiciens exceptionnels, du saxophoniste David Sanborn à Walter Becker et Donald Fagen de Steely Dan, en passant par Dr. John, qui ont rendu inoubliables des titres comme « Chuck E.'s In Love » ou « Coolsville ».

Rickie Lee Jones est un enfant de la balle. Ses grands-parents sont des artistes de cabaret fixés à Chicago. Son père, qui a suivi une médiocre carrière de comédien et de chanteur-compositeur, travaille, de même que sa mère, comme serveur dans un restaurant. Cette famille instable se déplace beaucoup entre Chicago, où elle est née, et Phoenix (Arizona). Rickie Lee fugue une première fois de Phoenix à l'âge de quatorze ans dans une voiture volée avec un garçon. Fixée à Olympia, elle est chassée du lycée pour conduite non conforme. Elle mène alors une vie de vagabondage à travers les grandes villes de la Côte Ouest , où elle vivote en travaillant dans des bars. Elle fait dans ces années-là la connaissance d'une société souterraine dont les lieux et les personnages apparaîtront dans ses chansons. Elle commence aussi à boire beaucoup, une habitude qu'elle n'abandonnera pas lors de ses débuts sur scène. « J'ai été aussi bas qu'on peut l'être et je m'en suis sortie. Alors il n'y a plus rien qui me fasse peur », déclara-t-elle un jour, citée par Irwin Stambler. En 1973, elle s'installe à Los Angeles dans le quartier bohème de Venice, où elle gagne sa vie comme serveuse. Elle écrit sa première chanson, « Easy Money », en 1976 : celle –ci sera reprise, deux ans plus tard, par le chanteur de Little Feat Lowell George dans son unique album solo, Thanks I'll Eat It Here (1979). Elle se produit alors dans des bouges pour 10 dollars par nuit, parfois accompagnée d'un trio de jazz, devant un public qu'elle a décrit à Stambler comme étant rempli de « motards, dégénérés, ivrognes et femmes édentées. » Sa dégaine particulière, mélange d'insolence urbaine (cigarillo au coin du bec, béret rouge vissé sur le crâne) et de féminité fragile et affranchie à la fois et, surtout, la drôlerie des histoires qu'elle raconte la font vite repérer, en particulier de Tom Waits, qui sera, un temps, son fiancé. Sa voix s'élance avec la fraîcheur et la liberté rythmique d'un soliste de jazz, partant souvent dans des vocalises. Un des dirigeants de Warner, Lenny Waronker, le producteur, entre autres, de Randy Newman, a le coup de foudre pour elle sur la scène du Troubadour de Los Angeles. Associé à Russ Titelman, il la fait aussitôt entrer en studio avec certains des meilleurs musiciens de rock et de jazz californiens, dont le saxophoniste David Sanborn, le guitariste Buzzy Feiten et le bassiste Willie Weeks, sans oublier la participation amicale de Dr. John et Randy Newman.

Sorti en simple en avril 1979, « Chuck E.'s In Love » (Chuck E. existe vraiment, c'est un ami de Tom Waits) propulse au sommet des ventes aux Etats-Unis son premier album (sans titre), où l'on trouve des morceaux devenus célèbres comme « The Last Chance Texaco » et « Danny's All-Star joint ». Elle obtient dans la foulée un disque de platine et le titre de meilleure chanteuse de l'année aux Grammy Awards de 1980. Son mélange de folk et de jazz, avec une forte dominante de rhythm'n' blues, l'apparente à Van Morrison, son chanteur préféré. Après un silence de deux années, Rickie Lee Jones revient en août 1981 avec Pirates, un album qui, produit par la même équipe, poursuit dans la même direction musicale que le premier : outre Feiten et Sanborn, on relève la présence du guitariste de Toto, Steve Lukather, et du chanteur et pianiste de Steely Dan, Donald Fagen. Mais le ton du disque est triste et désenchanté : les paroles d'une chanson comme « A Lucky Guy » dressent la chronique d'un échec sentimental (certains y voient l'écho de sa rupture avec Tom Waits). Dans « Traces Of The Western Slopes », elle se décrit « dans la pièce bleue et pâle à la poursuite des facettes et des traces d'un trésor qu'elle ne cesse de sentir vibrer en elle ».

Mal préparée au succès, Rickie Lee Jones mène durant ces années là une vie chaotique, déménageant de Los Angeles à New York, et développe une accoutumance à l'alcool et à la drogue. Elle s'installe à Paris en 1983 pour fuir ses problèmes. Cet été-là paraît un album de sept chansons, Girl At Her Volcano, constitué de reprises comme « On Broadway, « My Funny Valentine », « Walk Away Renée » et un inédit de Tom Waits, « Rainbow Sleeves ». L'orientation est plus rock et Rickie Lee Jones joue à la guitare électrique. Son vrai retour s'opère en octobre 1984 avec The Magazine, un album qu'elle coproduit elle-même à Los Angeles, où elle est retournée s'installer. Varié, avec des passages parlés, le disque diffuse une ambiance moins dure et urbaine que par le passé, à la mélancolie apaisée. Après un long silence marqué par la naissance d'un enfant en 1989, Rickie Lee Jones revient à la fin de l'année avec Flying Cowboys, un album à la tonalité légère, produit par Walter Becker de Steely Dan, avec une reprise de « Don't Let The Sun Catch You Crying » de Gerry & The Pacemakers. Elle a chanté cette année-là pour l'album de duos du bassiste Rob Wasserman puis avec les Chieftains et Leo Kottle. Fin 1991, Don Was a produit Pop Pop, un album entièrement acoustique, où elle est accompagnée par des musiciens de jazz comme Charlie Haden et Joe Henderson. Après Traffic From Paradise, paru fin 1993, où elle a repris « Rebel Rebel » de David Bowie, accompagnée par Lyle Lovett et David Hidalgo des Lobos, elle a publié un album à la mode unplugged, Naked Songs (1995), où elle a repris ses principaux succès. Associée à un collaborateur unique, Rick Boston de Low Pop Suicide, elle a publié en 1997 Ghostyhead, très influencé par le trip-hop de Portishead.