LE FOLK AMERICAIN : genre musical, apparu au XVIIe siècle aux Etats-Unis.

Les folklores de tous les continents ont marqué de leur empreinte la musique rock, laquelle plus que jamais pratique le brassage des genres. On s'en tiendra ici à la musique folk américaine.

Le folk américain n'est autre que l'acclimatation au sol américain des traditions musicales populaires des différentes communautés qui s'y sont retrouvées. Une oreille exercée y révélera une forte composante irlandaise, mais, à l'époque où cette musique commence à être enregistrée, la plupart de ses éléments constitutifs se sont mêlés au point de devenir presque indiscernables, et un long voisinage avec la musique country a définitivement américanisé cette musique, qui se souvient assez rarement de ses origines européennes.


Le folk a toujours véhiculé des textes puissants ; tenant longtemps lieu de tradition orale pour des populations en partie illettrées, il a eu tendance, comme le blues urbain, à se tourner de plus en plus vers le commentaire social, et la première moitié de ce siècle vit s'épanouir une verve contestataire, registre dans lequel s'illustra notamment le mythique Joe Hill : chanté par Woody Guthrie et Joan Baez, ce dernier fut considéré comme le pionnier de la chanson syndicaliste et, à ce titre, un des premiers grands auteurs identifiés de protest songs. A partir de 1932, Woody Guthrie (dont la guitare portait l'inscription : « cette machine tue les fascistes. ») jouera un rôle fondamental dans l'adaptation à son époque d'une musique fidèle à elle-même dans sa forme, mais de plus en plus impliquée dans les problèmes du temps. Les chansons elles-mêmes s'adaptent aux événements, comme le fameux « We Shall Overcome », un air aux origines mal connues, collecté par une musicologue lors d'une grève ouvrière dans les années 40, puis utilisé comme hymne lors de la grande manifestation antiraciste à Washington, en août 1963. C'est Pete Seeger, d'abord membre des Weavers, qui popularisera le morceau : on peut le considérer comme un des principaux artisans de la reconnaissance progressive du folk dans les années d'après-guerre. Parmi les artistes les plus influents de cette période, on citera encore Ramblin' Jack Elliott et le chanteur noir Leadebelly.

Très vivace, le folk s'implanta alors assez fortement dans les campus, ainsi qu'à Greenwich Village, le quartier intellectuel de New York. Bien que dans ses formes les plus radicales, il n'ait eu aucune chance de se faire entendre sur les ondes nationales (le sénateur McCarthy y veillait), l'existence d'une scène prospère, avec son grand rendez-vous annuel qu'était le festival de Newport, finit par propulser dans les classements des meilleures ventes quelques groupes de folk édulcoré, comme le Kingston Trio, et un peu plus tard le Chad Mitchell Trio et Peter, Paul & Mary. Ces derniers eurent l'immense mérite de populariser des thèmes d'un jeune disciple de Woody Guthrie qui se faisait appeler Bob Dylan et grâce à l'œuvre duquel le monde entier découvrira bientôt le folk dans sa toute liberté d'expression, voire toute son insolence. Le succès massif de Joan Baez, qui ne cache pas ses engagements politiques, aura de fait précédé de peu celui de Bob Dylan et, dans une large mesure, l'aura préparé. Phil Ochs, Tom Paxton, Peter LaFarge, Buffy Sainte-Marie, Tom Rush, Judy Collins, Tim Hardin, Mimi & Richard Farina et Leonard Cohen comptent parmi les principaux interprètes de folk qui profiteront de l'intérêt suscité par Joan Baez et Bob Dylan pour un genre qui, dès lors, ne verra plus son audience limitée à un public de connaisseurs.

A partir de 1965, le folk se fond tout à fait dans le paysage musical ambiant en évoluant en folk-rock, Bob Dylan lui-même donnant l'exemple en électrifiant sa musique sous l'influence du rhythm'n' blues britannique. Cette mutation fut perçue par certains comme un déni d'identité, la guitare sèche ayant été toujours l'instrument de base du folk, jusqu'à lui paraître consubstantiel. Il en résulta une vive réaction des puristes, dont beaucoup retournèrent au circuit des campus, et la conversion progressive de la plupart des artistes précités à des formes diverses de folk électrifié.

Aujourd'hui, si nul ne s'étonne de voir un Bruce Springsteen enregistrer des albums entiers de folk acoustique, on pourrait en revanche trouver plus surprenant que Nirvana rende hommage à Leadebelly dans son album MTV Unplugged In New York. On aurait tort. Le folk, un temps conspué par le punk et la new wave, fait désormais partie des influences totalement digérées par le rock actuel, et on s'aperçoit même q'il représente souvent une tentation pour certains rockers habitués à des formes d'expression plus brutales, comme l'ancien chanteur des Replacements Paul Westberg ou Peter Case. Par ailleurs, beaucoup d'artistes nous ont donné d'excellents albums de folk contemporain : c'est le cas, entre autres, de Tracy Chapman, de Michelle Shocked ou de Suzanne Vega. Inutile donc de dresser le bilan de l'« héritage » du folk : le folk est vivant et il est partout.