Faible jusqu'à être inexistante dans le rock des années 60, l'influence du rockabilly connaîtra, lentement mais sûrement, un fort regain d'intérêt au début des années 70. De plus en plus nombreux et organisés, des collectionneurs perpétuent le culte à Londres grâce à des disquaires spécialisés. La demande augmente et les originaux deviennent de plus en plus difficiles à trouver. En conséquence, des labels comme Ace en Grande-Bretagne et Charly en France entreprennent d'ambitieux programmes de rééditions. En 1971, le label Rollin' Rock est fondé en Californie par un immigré italien, Ronny Weiser (surnommé « le Hillbilly hébreu »), qui publie aussi un magazine du même nom. Il contribuera à faire connaître un obscur texan, Ray Campi qui sera célébré comme le roi du rockabilly par les teddy boys anglais dans les années 70. En 1973, les Néerlandais Bert et Frances Rockhuizen créent un magazine de disques à Amsterdam, Rockhouse qui devient bientôt un label, commençant à diffuser des disques de nouveaux groupes de rockabilly venus d'Angleterre, organisant bientôt des festivals et ce jusque dans les années 90.

En Angleterre, les teddy boys n'ont pas complètement disparu et la bande des rockabilly rebels de la fin des années 70 se situe bien dans leur lignée. En 1979 à Londres, un pub différent accueille chaque soir une formation de ce type. Les principaux groupes du revival rockabilly de cette période sont Matchbox (« Rockabilly Rebel », Magnet 1979) et Crazy Cavan & The Rhythm Rockers. On citera aussi Graham Fenton avec les House Shakers puis Hell Raisers et les Flying Suacers qui écument sans relâche le circuit des pubs dans les années 70, bientôt suivis de jeunes émules, Whirlind et les Polecats dont le guitariste Boz Boorer est depuis le début des années 90 l'animateur du groupe du chanteur Morrissey. Un cas tout à fait à part est celui du gallois Shakin' Stevens, véritable vedette populaire auprès d'un très jeune public au début des années 80.

Aux Etats-Unis, les Cramps, qui enregistrent dès 1977, inventent un nouveau son, sorte de rockabilly extrême, morbide et saturé, mâtiné de punk rock et de rock garage. Ils seront à l'origine d'un genre à part entière baptisé le « psychobilly », soit « rockabilly psychotique, aux paroles dérivées de films d'horreur et faits divers atroces. Durant la période punk-new wave émerge le plus classique Robert Gordon, un temps associé au guitariste Link Wray. A New York, la présence de Levi & The Rockats et le succès marginal du « Hot Rod Man » (1980) de Tex Rubinowitz ne laissent pas présager la tornade lancée de Londres par le trio d'exilés new yorkais des Stray Cats dès la fin de 1980. Ouvert à différentes influences, leur rock'n' roll n'est pas un pur rockabilly ; en revanche, leur allure, leur jeu de scène époustouflant, leur répertoire original et la virtuosité de Brian Setzer déclenchent une fulgurante mode rockabilly qui, en 1981, succède en Grande-Bretagne à la vague ska. Cette musique ressurgit alors brusquement aux Etats-Unis et surtout en Europe, notamment en France où les Stray Cats connaissent un immense succès. Ils suscitent partout de nombreuses vocations, mais aucun groupe ne saura vraiment relever leur défi. Influencés par les Cramps, les Meteors de P. Paul Fenech illustreront le mini-courant de psychobilly au début des années 80, demeuré marginal.

L'Europe sert traditionnellement de base au culte du rockabilly. C'est aux Pays-Bas qu'est né le prolifique label de rééditions White Label ; l'Allemand de l'Ouest Richard Weize a crée Bear Family en 1975. Des fanzines enfin alimentent le culte : New Kommotion et Now Dig This, en Grande-Bretagne. Les Etats-Unis célèbrent eux aussi leur propre passé. Le fanzine Blue Suede News paraît depuis 1986. Mais le plus intéressant et le plus singulier est de loin Kicks publié par Billy Miller et Miriam Linna, qui ont formé deux groupes, les Zantees puis les A-Bones, publiant des disques de Link Wray et bien d'autres pour leur label Norton. Il est, en dernier ressort, impossible de dresser la liste de tous les chanteurs et musiciens de rock qui se sont inspirés du rockabilly : le texan Bobby Fuller, digne héritier de Buddy Holly au milieu des années 60, Creedence Clearwater Revival puis Elton John jusqu'aux Cramps, déjà mentionnés (« Tear it Up », 1980). On peut citer aussi Jeff Beck, grand admirateur du style de Cliff Gallup, auteur d'un album dans ce style, Crazy Legs (1993), Neil Young avec son album de 1983 Everybody Rockin', Elvis Costello et son remarquable King Of America (1986), le guitariste Danny Gatton, le revivaliste gallois Dave Edmunds, le bostonien excentrique Jonathan Richman, les excellents Blasters de Los Angeles, le musicien de Memphis Tav Falco, sans oublier les Ecossais des Shakin' Pyramids, auteurs de deux excellents albums au début des années 80 et bien oubliés aujourd'hui.

Références :

•  Johnny Burnette & The Rock'n' Roll Trio : album éponyme.
•  Eddie Cochran : The Eddie Cochran Singles Album.
•  Charlie Feathers : Gone Gone Gone.
•  Buddy Holly : The Complete Buddy Holly.
•  Jerry Lee Lewis : All Killer, No Filler ! The Jerry Lee Lewis Anthology.
•  Carl Perkins : The Classic Carl Perkins.
•  Elvis Presley : The King Of Rock'n' Roll : The Complete ‘50's Masters.
•  Gene Vincent : The Gene Vincent Singles Album.