INDEPENDANT ROCK : genre musical apparu à la fin des années 70 en Grande-Bretagne.

Ce terme utilisé pour désigner le rock distribué et diffusé en dehors des grandes compagnies a fini par caractériser divers styles qui, aussi populaires soient-ils, comme REM à ses débuts ou Nirvana, restent opposés aux courants dominants relayés par la programmation des radios et des chaînes à clips.

Le rock naît indépendant. Les disques Sun qui diffusent les tout premiers enregistrements d'Elvis Presley au milieu des années 50, sont une petite maison indépendante animée par Sam Phillips à Memphis (Tennessee). Devenu une industrie dans le courant des années 60, le rock est rapidement contrôlé par des conglomérats qui, comme Columbia (CBS) aux Etats-Unis, possèdent des parts dans des stations de radio, maisons d'édition musicale, chaînes de télévision… Les européens EMI et Phillips font face à RCA, Warner, Atlantic, Capitol, United Artists, ABC, MGM. La notion d'une musique alternative, en marge d'une pop music de consommation plus large, naît à la fin des années 60 avec l'apparition de la notion d'underground (souterrain), qui regroupent des musiques d'abord connues des initiés, liées aux mouvement hippie, puis à la contre-culture née dans son sillage. Les premières maisons indépendantes britanniques sont Island, créée au milieu des années 60 par Chris Blackwell, et, dès 1973, Virgin, à l'origine un organisme de vente de disques par correspondance qui lance Mike Oldfield et Gong.


En 1977, l'explosion du punk-rock en Grande-Bretagne ébranle l'establishment : une myriade de petits groupes, surgis de toutes les provinces, prétendent se passer de maisons de disques institutionnelles, de leur divers salariés et de leurs réseaux. Le mot d'ordre est « Do It Yourself ». A Londres, la compagnie Stiff donne à des artistes alors considérés comme marginaux, Elvis Costello, Ian Dury ou Wreckless Eric, les (minuscules) moyens d'enregistrer et de publier des disques, réduisant les coûts au minimum. Beaucoup d'amateurs se rendent compte que les sommes pléthoriques dépensées par les dinosaures de l'époque (Who, Pink Floyd, Genesis) ne font pas forcément de meilleurs disques.

Au nord du pays apparaissent bientôt Fast Products (Leeds) et Factory (Manchester). Bientôt on aura vite besoin de réseaux fédérateurs pour permettre à ces petites productions de dépasser le plan local. Rough Trade (à l'origine un magasin de disques londonien) et The Cartel, association coopérative, jouent un rôle centralisateur et permettent de découvrir quantité de petits groupes novateurs et passionnants (Aztec Camera, Raincoats, Young Marble Giants), dont les employés des majors ne soupçonnent pas l'existence. L'équivalent français est New Rose : d'abord magasin de disques, puis petite compagnie et enfin réseau de distribution, la légère structure parisienne diffuse aussi la production d'artistes marginaux de France et du monde entier.


Aux Etats-Unis, Midnight tentera de couvrir toute la production indépendante, une tâche autrement difficile étant donné l'étendue du pays. Les années 80 ont représenté un âge d'or pour le rock indépendant. En Grande-Bretagne, outre Rough Trade et Factory, plusieurs petites compagnies ont défendu un style de musique marginal, dont l'influence puis la popularité furent souvent immenses : Mute a ainsi lancé l'electro-pop de Depeche Mode, mais a aussi soutenu des démarches plus difficiles, comme celles de Diamanda Galas ou Frank Tovey : 4AD a été à l'origine du courant dream-pop avec Cocteau Twins avant de suivre le renouveau du rock à guitares avec les Pixies à la fin des années 80 ; Creation, installé à Glasgow (Ecosse), lancera The Jesus And Mary Chain, My Bloody Valentine et enfin Oasis. En 1980, les hebdomadaires musicaux londoniens commencent à diffuser un classement des meilleures ventes des disques indépendants (qui représenteront jusqu'à 30% des ventes globales). Aux Etats-Unis, à côté de Midnight se développeront Voxx (prolongement du légendaire Bomp californien), Enigma, SST, Twin-Tone, Dionysos, Dishchord puis Epitaph qui connaîtra un essor inespéré avec le succès de The Offspring, et Sub Pop, qui lancera Nirvana.


En Grande-Bretagne, les groupes les plus influents des années 80, Joy Division, devenu New Order, puis les Smiths sans oublier les Stone Roses, ont d'abord été abrités par des compagnies indépendantes, vite chapeautés par des majors. Aux Etats-Unis, le phénomène le plus marquant du circuit indépendant fut celui du rock hardcore, inflexible et militant, avec les Dead Kennedys de Jello Biafra, les Bad Brains et Fugazi, dont l'influence sur REM puis Nirvana fut considérable. D'où la création, dans de nombreuses majors, de petits départements autonomes, comme Small chez Sony, chargés de regrouper des artistes à l'auditoire a priori indépendant, pou leur permettre de bénéficier immédiatement d'une diffusion massive si le succès vient.

Victime de son succès, le rock indépendant s'est dilué dans le rock de grande diffusion. Le succès des Cranberries ou de Radiohead ou encore des White Stripes, considérés comme alternatifs aux Etats-Unis, rend de moins en moins pertinente la distinction entre un rock facile de grande consommation et un rock indépendant touchant une minorité d'initiés. L'indépendant Creation n'a d'ailleurs eu aucun mal à faire d'Oasis le groupe le plus populaire d'Europe au milieu des années 90.