The Band THE BAND : groupe de rock américano-canadien, 1967.

- Robbie (Jaime) Robertson, guitariste. Né le 05.07.1944 à Toronto (Canada).
- Garth Hudson, organiste. Né le 0208.1937 à London (Canada).
- Richard Manuel, pianiste et chanteur. Né le 03.04.1943 à Stratford (Canada). Mort le 04.03.1986 à Winter Park (Floride).
- Rick Danko, bassiste et chanteur. Né le 09.12.1943 à Simcoe (Canada). Mort le 10.12.1999 à New York City (New York).
- Levon (Mark Levon) Helm, batteur et chanteur. Né le 26.05.1940 à Marvell (Arkansas).

Formé de quatre canadiens et d'un sudiste, ce groupe américain s'est d'abord rendu célèbre pour avoir joué avec Bob Dylan et vécu en communauté dans sa maison de Woodstock. L'un des groupes les novateurs de la musique populaire américaine. Passionnés par les racines de la musique américaine, ses musiciens, dont chacun avait uns style et sa personnalité, ont réussi la gageure de se réclamer des valeurs les plus conservatrices des Etats-Unis (le Sud, la tradition, l'héritage, le patriotisme) tout en participant au courant de la période contestataire de la fin des années 60 et du début des années 70.

Le groupe commence par accompagner le chanteur rockabilly Ronnie Hawkins, originaire, comme Helm, de l'Arkansas, enregistrant de 1959 à 1963 neuf 45 tours pour les disques Roulette. Il tourne ainsi aux Etats-Unis pendant plusieurs années avec lui sous différentes appellations : les Hawks, les Crakers, les Canadian Squires. Les musiciens canadiens sont repérés par John Hammond Jr., chanteur de blues et fils du célèbre producteur. Par son intermédiaire, ils rencontrent Bob Dylan à Greenwich Village. Ce dernier est alors sur le point d'opérer sa première mutation du style folk originel, purement acoustique, vers une musique plus électrique. Il engage le groupe pour une tournée mondiale en 1965-1966. En juillet 1966, Dylan est victime d'un grave accident de moto et The Band se retire avec lui dans une maison peinte en rose en pleine campagne dans les environs de Woodstock. Il compose sans cesse et enregistre de façon informelle avec Dylan le résultat de ces séances impromptues. La période est incroyablement fertile. Des bandes pirates d'enregistrements réalisés dans la cave de la fameuse maison commencent alors à circuler et elles formeront le disque pirate le plus mythique de l'histoire du rock.

Après une campagne de rumeurs savamment orchestrée, le premier album de The Band sort enfin en 1968, précédé d'une réputation flatteuse : Music From Big Pink contient ainsi des titres désormais classiques comme « I Shall Be Released » de Dylan ou « The Weight », au texte énigmatique signé Robertson, qui s'affirme comme un auteur de premier plan. L'album se démarque de la production rock de l'époque : pas un solo de guitare quand la mode est aux Jeff Beck, Clapton, Hendrix et consorts, et des harmonies vocales débridées, chaque voix traçant sa route, loin de la fusion recherchée par les autres formations de l'époque (Beatles, Beach Boys). Aucune tournée n'est pourtant prévue pour assurer les ventes de l'album et le succès commercial n'est pas au rendez-vous. Suit en 1969 The Band, qui reste le chef-d'œuvre du groupe. Le premier simple extrait de l'album, « Up On Cripple Creek », est toujours son unique et modeste succès. Le disque est composé quasi exclusivement de titres de Robertson, comme « The Night They Drove Old Dixie Down », qui deviendra un classique. Après un concert désastreux à San Francisco devant un public pourtant acquis à sa cause, The Band baptise son troisième album Stage Fright (qui signifie le trac) : sorti en 1970, il contient de nouvelles et belles compositions de Robertson. Malgré ce concert raté et cet album au titre peu engageant, The Band est un groupe de scène remarquable. Les chanteurs s'enchaînent et leurs possibilités instrumentales sont multiples : Hudson passe de l'accordéon au saxophone ou à l'orgue avec facilité. Helm abandonne parfois sa batterie pour passer le devant de la scène, une mandoline ou une guitare à la main, Manuel le remplaçant alors derrière les fûts. Robertson a, quant à lui, un style de guitare unique, économe, réfléchi, « mathématique », dira Dylan.

Suivent d'autres albums de qualité qui ne suffisent pas à masquer la légère baisse de régime du groupe. Cahoots, en 1972, est le premier album enregistré au Bearsville Studio qu'Albert Grossman vient d'ouvrir à Woodstock et contient quelques perles comme « When I Paint My Masterpiece » de Dylan. Pourtant, les titres de Robertson se font plus alambiqués et l'adéquation de son répertoire avec le côté primitif de The Band devient douteuse. Paraît ensuite Rock Of Ages, sorti en 1972, qui est son meilleur testament live, avec les arrangements de cuivre décapants d'Allen Toussaint. The Band retrouve la verve des tout débuts en reprenant avec énergie des standards du rock des années 60, se démarquant de ses concurrents par cette fidélité aux sources qui lui fait considérer avec une certaine condescendance les divas outrancières de la musique des années 70. Les musiciens de The Band gardent leur côté bûcheron authentique avec une touche redneck fiers de leurs valeurs (Creedence Clearwater Revival est probablement la formation la plus proche de The Band dans ce sens). Le public plébiscite les musiciens, et pas moins de 600 000 personnes les applaudissent aux côtés de Dylan et du Grateful Dead aux fameux Watkins Glen Festival qui se tient en 1973 près de New York. La même années, ils enregistrent leur premier album officiel avec Dylan : Planet Waves (1974), suivi du live Before The Flood (1974). Paraissent deux albums qui, malgré un niveau de qualité constant, ne retrouvent pas la magie des débuts : Northern Lights-Southern Cross (1975), premier album en studio du groupe en 4 ans, honorable, suivi par le plus décevant, Islands, en 1977. Après 16 années de tournées, The Band décide alors de mettre fin à sa carrière de la plus belle manière : un concert est organisé le jour de Thanksgiving en 1976 au Winterland de San Francisco. Sont invités Dylan, Eric Clapton, Ronnie Hawkins, Ron Wood, Ringo Starr, Neil Young, Joni Mitchell, Van Morrison, Muddy Waters, Emmylou Harris et bien d'autres. Un dîner est servi au public et Martin Scorsese filme le tout. Le résultat, présenté quelques mois plus tard sous la forme d'un film intitulé The Last Waltz, reste probablement l'un des meilleurs concerts filmés de l'histoire du rock. Sorti en 1978 avec un triple album pour l'accompagner, il restera l'objet d'un véritable culte.

Dans les années 80, Robertson se tourne vers le cinéma : il tiendra le rôle principal de Carny (Robert Taylor, 1980), un film qu'il a coécrit, et retrouvera Scorsese pour écrire la musique de The King Of Comedy en 1983 et de The Color Of Money en 1986. Il produit également Neil Diamond et sort enfin son premier album solo en 1987, près de 11 ans après la dissolution du groupe. Robbie Robertson, malgré la voix limitée de son auteur et des synthétiseurs envahissants (curieusement concoctés par Daniel Lanois), est néanmoins une réussite. Il est suivi par Storyville en 1991, un album enregistré à La Nouvelle-Orléans avec des membres des Neville Brothers et des Meters. Après Music For The Native Americans (1994), la BO essentiellement instrumentale d'un documentaire télévisé consacré aux Indiens d'Amérique, il a publié Contact From The Underworld Of Red Boy (1998), où il a fait appel à Howie B., collaborateur de Björk, Massive Attack et U2, mêlant des choeurs d'Indiens à une texture venue de la dance.

Rick Danko avait été le premier membre de The Band à sortir un album sous son nom dès 1977. Levon Helm a fait équipe avec Paul Butterfield, Dr. John, Booker T., Steve Cooper et Donald « Duck » Dunn, et enregistre deux albums pour ABC sous le nom de Levon Helm And The RCO All Stars, Levon Helm en 1978, et American Son en 1980, puis Levon Helm en 1983 chez Capitol (aucun de ces albums ne connaissant un gros succès). Présent lui aussi au cinéma, il apparaît dans Cool Miner's Daughter (Michael Apted, 1980) aux côtés de Sissy Spacek puis dans The Right Stuff (Philip Kaufman, 1983). Malgré ces activités individuelles, The Band se regroupera en diverses occasions, sans Robertson (« c'est comme Hamlet sans le prince », écrivent les critiques). La formation continue à remplir les clubs aux quatre coins du monde. Après une soirée de retrouvailles en Floride, en 1986, Richard Manuel est tragiquement retrouvé pendu dans sa chambre d'hôtel. Eric Clapton lui dédiera son « Holy Mother » quelques mois plus tard. Danko et Hudson apparaissent dans les albums de Robertson, contrairement à Helm qui entretient visiblement une sérieuse rancœur vis-à-vis du guitariste et lui fait porter la responsabilité de la séparation. Il publie son autobiographie au début des années 90 : This Wheel's On Fire, dans laquelle il insiste sur la propension de Robertson à monopoliser les signatures des titres. Et quand le groupe est élu au Rock'n' Roll Hall of Fame en 1994, Robertson est rejoint par Danko et Hudson, mais Helm brille par son absence. The Band tourne ensuite souvent avec le renfort du Cate Brothers Band. En 1993, il se retrouve en studio (sans Robertson), et produit un album tout à fait respectable, Jericho, 17 ans après The Last Waltz, mêlant comme à son habitude sons et traditions américains. Il enchaîne alors les tournées, accompagné du guitariste Jim Weider et du batteur Randy Ciarlaine. C'est avec cette nouvelle version que The Band enregistre High On The Hog en 1996, produit par Aaron L. Hurwitz, interpréteront comme un signe de fatigue évident, et d'autres comme la marque de leur dévotion toujours renouvelée pour les choses du passé.